Old friendship, new adventures

NJALL KJELDSON - VILI BORSON

Quelques fois il était difficile d'être un Dieu en couverture. Les gens qui connaissaient son secret ou se doutaient de ses pouvoirs se comptaient sur les doigts de la main et la plus part étaient juste... Absents. Vili voulait se sentir comme un homme, comme un mortel. Mais il n'en était pas un. Malgré tous les efforts qu'il mettait dans sa vie de tous les jours, à jouer l'herboriste voyageur inoffensif qu'il se voulait, ce n'était qu'un rôle. Certainement un rôle qui représentait aussi beaucoup sa personnalité et son réel comportement, mais un acte quand même. Vili ne pouvait pas parler de ses troubles les plus profonds et il ne pouvait pas parler de sa famille, de ses regrets, de son enfance... Rien de tout cela ne devait être révélé et il devait porter son fardeau tout seul. Mais dans cette espèce de solitude existentielle, il y avait certains hommes qui se révélaient être à une hauteur supérieure. Njall était l'un d'eux. Érudit attentif et appliqué, il était un des seuls vikings qu'il connaissait qui avait poussait ses capacités sur le chemin du savoir. Malheureusement, dans ce monde, assez peu de personnes survivaient grâce au savoir pure. Il était difficile, en effet, en hiver, de troquer du savoir pour de la nourriture. Mais il avait réussi à concilier sa vie d'une manière pratique et ses voyages l'avaient rendu incroyablement intéressant. Le genre de personne avec qui on pouvait avoir une conversation sur presque tout. Ainsi, Vili avait quelqu'un avec qui débattre et parler. Bien entendu, il ne lui avait pas révélé son secret et essayait d'éviter de paraître trop érudit, trop omnipotent et trop savant, mais au moins pouvait-il dépassait le niveau basique de conversation qu'il avait avec une bonne majorité de sa clientèle.

L'homme s'était même mit à s'intéresser au Dieu Unique. Non pas qu'il semblait vouloir totalement abdiquer ses croyances envers le Panthéon d'Odin, mais il était curieux. Cette curiosité n'était pas tant un signe du doute qui l'assaillait au sujet de ses Dieux mais peut être plus un simple questionnement théorique. Pour Vili qui n'avait que récemment songer à retourner à Asgard, il s'agissait là d'une énième preuve de faiblesse de son frère. Rassembler les vikings sous sa bannière aurait rendu totalement obsolète le fait pour un autre Dieu de venir faire son marché dans le coin. Si les gens étaient contents d'un Jarl, ils ne voyaient pas la nécessité de se retrouver à déménager dans des contrées plus accueillantes. Ce nouveau Dieu, pour Vili, symbolisait une terrible marque de déchéance appliquée à tous les Dieux, quels qu'ils soient. Un signe qu'ils avaient échoué. La jalousie était un moteur puissant. Des batailles des hommes pour regagner le cœur de l'être aimé aux batailles de Dieux qui avaient secoués Asgard, la jalousie et l'envie de posséder avait toujours été un thème récurrent dans tout l'Arbre Monde. Comme si, la fondation même de leurs êtres se calculait au nombre d'adeptes, de cœurs qui battaient pour soi et simplement, au nombre de personnes qui nous entourait. Constater que leurs fidèles partaient petit à petit vers des pâturages plus agréables réveillerait peut être les autres... Odin bouté hors de son trône, son frère ne comptait pas sur lui pour avoir un regain soudain d'intérêt envers les humains. Sa chance était passée. Peut être que Thor serait un meilleur espoir dans toute cette histoire.

Mais par tous les cieux, si seulement le vieux Vili n'avait que ces soucis-là à régler... Mais des rumeurs étaient venues à ses oreilles, portées par des voyageurs, que d'étranges étendues étaient apparues. Évidemment, Njall les avait aussi entendues. Les descriptions de ces formes étaient assez variés et l'instinct de survie de beaucoup d'hommes les avaient découragé de soudainement se mettre à explorer plus avant ces choses. Mais pour deux érudits comme l'herboriste ou le viking, le savoir valait le risque. C'est ainsi qu'&alors que Vili prévoyait déjà de se rendre sur les lieux, il reçu un message de son ami l'invitant à l'enjoindre dans sa recherche au sujet de la forme au sommet du fjord. Il lui donnait rendez-vous près d'une immense pierre qui marquait le croisement de deux petites routes. Les habitant locaux l'appelaient la Pierre du croisement pour se repérer. Il l'attendrait dans deux jours, vers midi et l'attendrait une heure avant de partir. L'herboriste se dit qu'un petit voyage pour explorer ce mystère lui rafraîchirait les idées. Il était perdu. Il savait qu'il devait rentrer à Asgard, mais en même temps, le comment et le pourquoi l’embêtaient. Peut-être trouverait-il une solution à son problème en même temps que la solution à ce problème de flaque qui semblait toucher Midgard ? Il pouvait toujours tenter !

Ainsi, le vieux se fit une grosse besace de provision. Une gourde d'eau, de la viande séchée au sel, du poisson conservé dans des bandes de miel, des fruits, des graines et du vieux pain acheté la veille au village qui comblerait plus son ventre que ne contenterait son palet. Il rajouta à ça, deux couteaux, dont un tranchant comme un rasoir, au cas ou, un bâton de marche, des onguents et des bandages, et un peu d'alcool (tant pour le courage que pour désinfecter). Il enfila une grande cape à capuche, comme il portait tout le temps, et se mit en route. Il n'avait jamais eu besoin de plus pendant ses voyages. Sa cape était tellement épaisse qu'elle pouvait servir de couverture si il devait dormir à la belle étoile. Les renfoncements naturels de la terre et les racines des arbres offraient déjà une protection suffisante pour une courte nuit loin du vent glacé. De plus, il trouvait toujours des personnes avec qui troquer en route et il s'était rarement retrouvé totalement fauché. Sur la route, il ne pouvait s'empêcher de déjà extrapoler sur ces étranges flaques. Déjà sur leurs tailles. Il avait entendu certains dire que ce n'était « que » des flaques et d'autres que ça ressemblait presque à une mer. Mais la déformation populaire était une discipline très humaine et il savait qu'il faudrait mieux se faire une idée soi-même. Arrivant près du rocher, il trouva une pierre plus petite où s'asseoir le temps de vérifier brièvement son matériel. Alors qu'il leva le nez de sa besace, il vit, au loin, arriver son compagnon de route. Vili leva une main pour le saluer et lui lança « Ho l'ami ! Comment allez-vous aujourd'hui ? Je dois avouer, j'étais déjà presque entrain de préparer mes propres affaires pour partir voir ça quand j'ai reçu votre message... Vous m'avez à peine devancé. » Vrai et faux, car finalement, il avait longtemps hésité à ne pas aller à Asgard, plutôt, et s'occuper de ça plus tard. « Cela fait bien longtemps que je n'ai pas un peu voyagé, ça me changerait d'air un peu, ça me fait plaisir que vous m'ayez invité à votre petite expédition. Qu'avez-vous entendu sur tout ça ? Je dois avouer que j'en ai entendu des vertes et des pas mûres, je ne sais quoi en penser... » Extrapoler était presque aussi excitant que savoir. Un meilleur mot serait, faire des hypothèses... Et pour le moment, Vili était assez peu chanceux de son côté, il n'avait aucune idée de ce qu'ils allaient trouver.

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NJALL KJELDSON - VILI BORSON

Son camarade s'était aussi bien parré pour ce voyage. Après tout, qui savait où ils finiraient par atterrir ? Vili avait depuis des milliers d'années élaborer son bagage de voyage. Il se réapprovisionner sur le chemin et connaissait très bien les environs pour réussir à se sustenter avec les produits naturels qu'il pouvait trouver. Heureusement que le Dieu déchu n'avait pas besoin de grand chose, par contre, car il en avait vu beaucoup succomber avec le même régime... Mais dans l'immédiat, ils devaient théoriquement aller jeter un coup d'oeil et revenir. Bien entendu, il serait fort peu probable que les deux érudits se retirent rapidement si une chose étrange se retrouvait sous leur nez. Ils auraient plutôt tendance à s'aventurer plus en avant même si leur raison leur disait de faire le contraire. La curiosité était autant une alliée fidèle de l'intelligence qu'une ennemie mortelle de la raison. On fourrait son nez partout, surtout là où il n'avait rien à y faire. Vili en savait bien quelque chose, il avait quelques fois l'impression que tout le concernait mais il avait apprit à faire le tri... Pas assez bien apparemment car il s'était retrouvé chassé d'Asgard. M'enfin, on ne pouvait pas être parfait, et Vili se disait que tant que la corde ne cédait pas, il tirerait dessus jusqu'à l'usure. Après tout, comment terminerait-il sa vie autrement que part l'usure de sa chance ? Tellement curieux qu'il était, il devait absolument voir jusqu'où s’arrêtait sa fortune et en profiter jusqu'au bout. L'inaction n'avait jamais fait partie de sa vie. Après, il fallait faire avec les effets secondaires qui arrivaient. Répondant à son ami sur ce problème qu'ils partageaient. « Le quotidien a beau être rassurant, je lui préfère l'aventure avec toutes les incertitudes que ça peut des fois renfermer. Après tout, les connaissances ne nous viennent pas par le pouvoir des Dieux mais par les efforts des érudits, comme vous, et moi... » Ca c'était vrai. Les connaissances et la culture des hommes venaient souvent par des rigoles de sang et de morts. L'identité d'un peuple se payait souvent au prix fort et surtout, la connaissance était une arme qu'encore trop d'humains et de Dieux négligeaient. La force, l'immortalité n'étaient rien sans mémoire et sans faire quelque chose d’efficace de ce qu'on pouvait rassembler de son expérience. Sans ça, on aurait mieux fait de ne jamais avoir vécu. Et chez les Dieux, il y en avait une poignée qui, même avec des millénaires derrière eux, n'avaient pas fait de différence positive autour d'eux. Une honte...

Entamant la marche qui promettait d'être longue mais calme, le vieux écouta les informations que partageait l'érudit avec lui. Des rumeurs, oui, comme tout le monde il en avait entendu parler, mais lui, avait aussi et surtout des recherches qui semblaient aller dans le sens de ce qui venait de se passer avec ces étranges formes. Apparemment les völva avaient guidé ses recherches dans une direction qu'il suspectait être la bonne. A vrai dire, Vili savait qu'il se pouvait que des passages comme cela existait mais il n'avait jamais vraiment cherché de ce côté à part quand cela lui avait été utile, et la dernière fois remontait à très longtemps. Vili avait ses techniques de vieux Dieu de se déplacer et il avait parcouru le Bifrost plus souvent qu'il n'avait été à la pêche. Il écouta son ami en hochant la tête, doucement, lui même dans ses petites pensées. Mais Njall interpella son compagnon de route sur les possibilités qui les attendait plus loin sur la route. « Hum... J'avoue qu'il y a tellement de possibilités, que je ne sais laquelle préférer. Mais votre hypothèse semble en effet concorder. Si il est possible que ces passages soient ouverts à présent, j'avoue que cela m'inquiète. Comment ont-ils été ouverts, pourquoi, par qui ? Qui aurait intérêt à faire une pareille chose ? Cela pourrait se révéler très dangereux pour nous aussi... Les choses qui pourraient arriver à Midgard, plus fortes, plus braves, plus sombres que tout ce que nous avons pu voir dans nos existences. Si votre théorie se trouve juste, je crois que la solution la plus sage serait de trouver un moyen de mettre un terme à cette situation... Ne croyez-vous pas ? » Il se tut un instant, considérant son ami.

Passer d'un monde à l'autre c'était autrement différent que laisser une porte ouverte sur Midgard. Si on pouvait, en effet, passer de l'autre côté et explorer les autres mondes de l'Arbre Monde, d'autres choses pouvaient passer par une porte ouverte. Et là, c'était tout sauf préférable. Vili qui chérissait le libre arbitre et l'évolution toute personnelle des hommes voyait cette possibilité comme quelque chose allant contre tout ce qu'il croyait. Qu'importe si il dusse se débarrasser de son ami si il se montrait trop récalcitrant à l'idée de refermer ces passages, il faudrait trouver un moyen de limiter la casse. La pensée le remplit d'une mélancolie lasse, souvenirs d'autres compagnons de route à travers les âges, qui avaient tous quitté la vie humaine en laissant le vieillard derrière eux, toujours là, foulant toujours ces terres pour y découvrir encore mille mauvaises surprises. « Mais après, il se peut que ça soit une toute autre chose. Nous aurons certainement du temps pour réfléchir à cet épineux problème, n'est-ce pas ? Qui sait ce que les Dieux vont nous réserver... » Rien de malheureux, il espérait, et rien de létal, surtout. Car Vili n'était pas prêt à devoir s'occuper d'un tel problème tout de suite, avec ses propres problèmes personnels qui venaient tout juste de refaire surface. « Et puis-je vous demander comment votre théorie sur les passages menant à Asgard ont commencé ? Des visions de völva ? Ou des témoignages ? »